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05/04/2021

La fille de l'île









LA FILLE DE L'ÎLE





















OUBLI



avec le temps me reviennent

Des histoires de mon passé

des bévues et des fredaines

Que je croyais effacées

Des amours d'une semaine

D'une folie d'un été

Des erreurs des calembredaines

Des mensonges des billevesées

Pourtant elles me souviennent

avec tant de netteté

Et de façon si soudaine

Que je ne peux en douter

Si j'en ai rêvé certaines

D'autres ont bien existé

Et j'ai encore de la peine

De les avoir vues s'évader

Parmi ces liaisons anciennes

Je vois avec acuité

Le visage d'une îlienne

Sa jeunesse sa beauté

Je sens sa main dans la mienne

L'insolent de ses baisers

Était-ce à Ouessant où Molène

Il a coulé trop d'années

trop de fées trop de sirènes

Passantes que j'ai cru aimer

Était-ce à Paris où à Rennes

Comment ai-je pu oublier...









TRAVERSÉE

La mer envoyait ses paquets

Balayer le pont

Du bueguel Eusa

Le bateau tanguait et roulait

Dans ce béton

Verdâtre et froid

 

Moi je fuyais la capitale

Et la folie et le mal

 

Novembre essayait d'être laid

Avec son crachin

Comme un ciel qui pleure

Les terres disparaissaient

Sous les embruns

Dans le Fromveur

 

Je fuyais l'alcool des nuits

Et la violence et l'ennui

 

Emmitouflée dans la cabine

Regard plongé dans un bouquin

Elle ne voyait rien j'imagine

C'était pour elle quotidien

Moi j'avais plutôt mauvaise mine

La pâleur du parisien

Avec un zeste de déprime

La tempête m'allait si bien

 

 

 

 

 

 

 

 

Et puis elle a levé les yeux

Le port approchait

Cette beauté soudain

Cette fille au regard si bleu

Qui me regardait

J'étais encore loin

 

Elle m'a donné un sourire

Je n'étais pas près d'atterrir

 

Le matin était gris et doux

J'étais arrivé

Dans le bout du monde

Ses cheveux dansaient sur ses joues

comme avait dansé

L'écume sur l'onde

 

Je ne savais pas où dormir

Elle m'avait donné un sourire.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



PARIS

Ah Paris Paris Paris du jour

Le matin glauque les yeux lourds

Le chambardement des entrailles

Un café rhum pour que ça aille

Paris Paris et le turbin

Des sept heures et demi le matin

Le jour est long et sans espoir

Tu bosses jusqu'à six heures du soir

Paris métro pour le voyage

La variété du paysage

La page de pub dans les stations

Et le tunnel Dubo-Dubon

Paris de la sueur et du temps

Qui file triste et fatiguant

Paris le sandwiche de midi

Dans un troquet vieillot et gris

Ah Paris Paris Paris des nuits

Paris de rues et des oublis

Quand il n'y a plus d'aujourd'hui

Plus de demain que la folie

L'herbe qui pousse sur l'alcool

Pour être sûr que ça décolle

Paris qui danse sur son nombril

Comme sur le ventre d'une fille

Paris le soleil de minuit

Ou le boulevard sous la pluie

Paris des putains attirantes

Et du sommeil qui s'absente

Paris de l'aube qui hallucine

Pendant le retour à la mine

Paris de la mort annoncée

Et le départ est arrivé...

La baie de Lampaul tranquille Et le sourire de cette fille.

LE GÎTE



L'hôtel était fermé

A quoi bon ouvrir

S'il n'y a pas de clients ?

La patronne du café

M'a donné une adresse

Chez l'habitant



Je ne savais pas

En frappant à la porte

Qu'elle serait là

Comme dans un songe

Où Morphée m'emporte

Quand dans ses bras je plonge



Sa mère est venue

J'ai payé une semaine

Je ne savais plus rien

La vie avait disparu

La ville et la haine

Et j'étais bien







COUP DE FOUDRE

Dans le pâle soleil du matin

Je l'ai accompagné au porc

Nous avons gardé nos distances

Sur la lande tout se voit de loin

Pas un arbre dans le décor

Nous avons gardé le silence

 

Parfois nous nous sommes regardés

Et nos sourires étaient bavards

J'avais pour moi seul la beauté

Celle du monde celle de son regard

 

Et sur le chemin du retour

Ses cheveux volaient sur le vent

Son pull dessinait ses seins

La folie nous tournait autour

Me faisait bouillir le sang

Alors je lui ai pris la main

 

Ça a duré dix mètres à peine

avant les premières maisons

Dans sa paume contre la mienne

Je sentais une douce vibration

 

Je l'ai laissé là sur le seuil

Je suis parti me promener

Il faisait si beau ce jour là

J'étais léger comme une feuille

J'avais envie de m'envoler

Les vagues rugissaient ma joie

 

dans un creux entre les rochers

Dans le sable je lui ai écrit

Les mots que l'amour ne dictait

La plus belle des poésies

 

Bientôt la mer a effacé

Ce message qu'elle n'a pas lu

Mais par transmission de pensées

Je sais bien qu'elle l'a entendu.









PRÉ SALÉ



Loin des restaurants miteux

Les bars pourris les bouis-bouis

Les casse-dalles calamiteux

Les verres sales la bière aigrie



Le nuage de fumée

Flottant sous le plafond jauni

Le steak dur vite avalé

Les légumes vite vomis



Loin l'œuf dur du comptoir

Avec son goût d'eau usée

Les rêves de vrais tartares

A la viande avariée



Les choucroutes ratatinées

Le vin blanc qui fait des trous

Les sardines trop huilées

Qui imbibent le pain mou



Bout de terre entourée d'eau

que puis-je manger de meilleur

que des côtelettes d'agneau

Pour consolider mon bonheur



C'est simple autant que c'est beau

C'est parfumé et succulent

Rien n'égale la viande d'agneau

De pré salé de Ouessant !





NUIT EUSA

Dans sa chambre d'adolescente

Aux murs décorés de posters

De tous ces rêves qui la hantent

Je suis passé avec sa mère

Simplement pour lui dire bonsoir



On a échangé un sourire

Quand la maman tournait le dos

Je n'avais pas envie de dormir

Son regard me faisait chaud

Comme le soleil troue le brouillard

Demain matin elle partira

Vers Brest et la cour du lycée

Je crois qu'elle me manque déjà

Mardi sera vite arrivé

enfin je pourrai la revoir



Les yeux ouverts sur ce lit

J'entends les vagues qui déferlent

Décorent le silence de la nuit

Comme dans l'aube le chant du merle

Je pense à elle dans le noir



que suis venu faire ici ?

Qule piège me tend le hasard

Quitter la ville et sa folie

Tordre le cou du désespoir

Je pense à elle dans le noir

Demain matin elle partira

Vers Brest et la cour du lycée

Je crois qu'elle me manque déjà

Mardi sera vite arrivé

Enfin je pourrai la revoir...

LUNDI



Lundi je me suis fait des copains

Pour échapper à la pluie

Je suis resté au bistrot du coin

Pour tromper l'attente et l'ennui

Il y avait quelques mecs au rade

Qui avait l'air d'écluser sec

rien à faire d'autre que boire avec

Et devenir bons camarades



On s'est marré comme des benêts

A se moquer des parisiens

Des marseillais et des lyonnais

Et puis aussi des ouessantins

Ils connaissaient bien sûr les gens

Chez qui j'avais une carrée

Des discrets des pas causants

Comme l'île sait en fabriquer



Que la fille était bien jolie

La plus belle dans les parages

Ils auraient aimé qu'elle dise oui

Mais elle était si sauvage

Le retour a été bien long

Je tanguais comme sur les vagues

Je devais avoir l'air d'un con

Sous la pluie marcher en zigzag



Mais la journée se finissait

Et j'étais bien dans mon ivresse

Quand je vis mon lit j'étais fait

Et j'y tombais à la renverse.

AMOURÎLE



J'étais flottant dans ce nuage

Près de la pointe de Créac'h

Imaginant des mélodies

Dans le son rauque

De la corne de brume

J'étais entre angoisse et espoir

devant la suite du voyage

Je scandais son nom en silence

Sur mon pas dans le brouillard

Impatient de la revoir

Peut-être de reprendre sa main

Et de lui dire des bêtises

Chaque instant me menait vers elle

Bercé par les cris des mouettes invisibles

J'avançais dans la gwerz lancinante

De cette merveilleuse folie

La veille je l'ignorais

Elle m'ignorait aussi

Ai-je depuis aimé avec autant

D'amour ?



OBSESSION



Allongé sur ce grand lit froid

Je bouquinais les fleurs du mal

Ou autre chose je ne sais pas

Peut-être même le journal

Je la voyais à chaque page

Je l'entendais à chaque mot

Elle m'avait mis dans une cage

Dont elle était tous les barreaux

Je fermais les yeux pour dormir

Pour sortit de cette obsession

Mais je retrouvais son sourire

Le sommeil fuyait pour de bon

Je regardais par la fenêtre

Tourner la lumière du phare

Mais dans mon corps et dans ma tête

Rien ne perçait le brouillard

Je voulais maudire le jour

Où j'étais venu sur cette île

Où j'avais reconnu l'amour

Dans le regard de cette fille.





VAGUES



Comme dans une hallucination

avec a fatigue et la brume

Une irréelle apparition

Aérienne comme une plume

Elle est entrée silencieuse

Ses ailes portées par le vent

Dans la lumière cafardeuse

Elle a amené un printemps

J'ai d'abord cru à une vision

La nuit a des effets pervers

Un excès d'imagination

Elle m'a fait signe de me taire

 

Tremblante un peu sans qu'il fasse froid

Elle semblait encore indécise

Elle s'est approchée de moi

Et elle a ôté sa chemise

Alors j'ai ouvert grand le lit

Elle s'est glissée entre les draps

Frissonnante fraîche et transie

Je l'ai serrée entre mes bras

Les vagues caressaient la plage

De sa peau comme de la soie

Nous sommes partis en voyage

Plus haut que tous les au-delà

 

Aller jusqu'au bout du désir

Chaque retour est un départ

On sait que la nuit doit finir

Que reviendra le jour blafard

Alors on s'est donné sans fin

C'était pour elle la première fois

Et quand est venu le matin

Elle dormait tout contre moi

Combien de filles dans mes nuits

Une semaine un jour ou un mois

Et qui sont tombées dans l'oubli

Pour que ne reste que celle là

 

Les vagues caressaient la plage

De sa peau comme de la soie

Nous sommes partis en voyage

Plus haut que tous les au-delà.





LES MOTS

Je voudrais connaître les mots

Que la poésie distille

Dans son alambic

Dire la force du printemps

Quand il vient au cœur de novembre

Jouer sa musique

 

Dire le soleil de la nuit

La chanson du vent sur le toit

Compagnons d'instants fantastiques

Traduire tout ce qu'elle m'a dit

Prise dans l'étau de mes bras

Pour ce voyage magnifique

 

Je voudrais vivre infiniment

La douceur de ces instants

Ces délices harmoniques

retrouver ce goût ce parfum

Le velouté du satin

De sa peau douce et magique

 

Dire le soleil de la nuit

La chanson du vent sur le toit

Compagnon d'instants fantastiques

Pris dans l'étau de ses bras

Pour ce voyage magnifique

 

Si loin des peurs irraisonnées

La mort derrière la porte

La folie toujours à guetter

Le petit bonheur qu'elle emporte

La course effrénée des jours

Les nuits au bord des démences

L'angoisse qui joue des tours

Et la prison du silence

 

Si loin l'avenir triste et gris

De la grande ville sans lumière

Sinon le néon sans vie

De ce tunnel sous la terre

Si loin les amères aventures

Qui me laissaient désespéré

Bien loin cette désinvolture

Qui ne servait qu'à me cacher

 

Je voudrais connaître les mots

Que la poésie distille

Dans son alambic

Dire la force du printemps

Quand il vient au cœur de novembre

Jouer sa musique.

 



JE L'AIMERAI



Le lycée l'avait reprise

Les vacances seraient pour plus tard

Moi j'avais des choses à régler

A dérégler

Je ne voulais plus de Paris

Je ne voulais plus du désespoir

J'avais envie de m'envoler de rêver

Le samedi elle reviendra

On se croisera sur le quai

Et le bateau l’emmènera

Enez Eusa

Je lèverai le pouce

Au bord de la route

La pluie cachera mes larmes

Enfin s'il pleut

Un jour je reviendrai c'est sûr

Mais demain est bien compliqué

Je suis devant tant de ruptures

Tant de blessures

Que garder de cette aventure

Que le vent de la liberté

Soufflant de la mer un air pur ou impur

Demain est un autre monde

On ne peut pas s'arrêter

J'avance et chaque seconde

Fait partie de mon passé

Je vis avec cette histoire

Et avec bien des regrets

J'avais beau ne pas vouloir

Cette fille je l'aimais

Le bateau a quitté le port

tout a changé désormais mais jusqu'à ma mort cette fille je l'aimerai !

OUBLI



Je l'ai revue par hasard

Quelques années plus tard

A Vannes allez savoir

La chance nous conduit

Nous nous sommes regardés

Le temps avait glissé

Elle n'avait pas changé

Et nous avons souri

 

Au café de la mairie

Assis à la terrasse

J'ai commandé un demi

Elle a pris une glace

 

On ne se disait rien

Ses yeux au fond des miens

Elle a dit : tu vas bien

Pour rompre le silence

Elle venait ici

Chez son petit ami

Quelques jours quelques nuits

Elle était en vacances

 

Moi j'étais installé

Je vivais près d'ici

J'allais me marier

J'ai fini mon demi

Alors on s'est levé

Il fallait se quitter

L'amour était passé

Était enfuie la fièvre

A chacun son destin

Il y a tant de chemins

Je lui ai pris la main

Et j'ai baisé ses lèvres

 

chacun de son côté

On a repris la route

Elle ne s'est pas tournée

Un peu triste sans doute

 

J'y pense maintenant

Il s'est passé trente ans

J'ai des petits enfants

Des douleurs de l'arthrose

Quelquefois dans la nuit

Avec mélancolie

Je repense à nos nuits

Et puis à autre chose...



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