02/08/2008
PARFOIS
L’amour désarticule le sang de l’éphémère
Le précipice ouvert sous le fil aveuglé
Puits profond de silence
Et parfois je me vois mendier dans le désert
Parfois je rêve encore de cette éternité
Comme d’une innocence
Il peut pleuvoir comme le vent peut souffler très fort
Un fragment d’azur clair peut déchirer le gris
Venir même le printemps
Parfois mes jambes sont lourdes je regarde dehors
Sans trouver de courage même au cœur de la nuit
Quand l’escalier descend
L’amour même la haine me deviennent étrangers
Je flotte au gré de l’air parfois dans une bulle
Et je suis libre enfin
Dans le poison cruel de cette liberté
Le tranchant du rasoir sous mon pas funambule
Comme unique chemin
Le poids de l’or me ploie sous sa charge imposante
Je fermerai ma gueule un de ces jours prochains
Lorsque tout sera dit
Jamais je n’ai écrit de chansons qui se chantent
Si parfois j’ai voulu m’y noyer mes frangins
Des torrents de whisky
Je laisserai pourtant ces délires gravés
Des poussières de cagnard avant l’heure des moustiques
Des soleils qui se lèvent
Quelques étoiles filantes dans le ciel d’un été
Des concrétions amères qui se voulaient musiques
Les mots pillant les rêves
Parfois le blanc nacré sur des routes lointaines
Un Claudio mâchonnant une baguette en béton
Et tant d’autres voyages
Des navires sauvés d’un port en quarantaine
Sur la mer givrée d’une autoroute sans fond
L’aventure en bagage
Je suis né immobile parfois je vagabonde
Et je refais des pas tant de fois déjà faits
Qui ne se refont pas
Chaque instant m’est précieux tant que je suis au monde
Ma mémoire est un gouffre qui se gonfle de laid
Et de beau quelquefois
Je n’oublie jamais rien je m’arrange et je passe
Je fais des analyses dans mon laboratoire
Je triche un peu parfois
Je lâche l’animal si l’animal me lasse
Je tangue vers l’obscur j’y devine un espoir
Dans le cœur lourd et froid
Hambourg Copenhague Prague Bratislava
Satu-Mare Bercu Dunkerque Rotterdam
Quand parfois j’y reviens
Ultime vagabond qui traînaille par là
Tant de temps qui s’écoule où s’écoule mon âme
Quand il n’y a plus rien
J’étends mes jambes maigres au cygne qui décolle
Avec mes pieds puant trempant dans le Neckar
Sous la pluie germanique
Parfois je laisse au fond un peu de cet alcool
Cette chair de houblon que l’on boit jusque tard
Une bière utopique
Je naufrage parfois d’un sombre désespoir
Je laisse dériver ma barque sur mon ire
Et je vais jusqu’au bout
Le matin me réveille arpégé de guitare
Et de cernes bleuies allégées d’un sourire
La sagesse du fou
Je suis d’os et de peau et de ce sang impur
Qu’on apprend aux gamins qui s’en font une idée
Pourtant je reste intact
Rien de rien en ce monde dont je puisse être sur
Que la mort qui m’attend à cette extrémité
Et qui manque de tact
Je n’oublie rien jamais et je sourie encore
L’out back violet de l’été en décembre
Où je n’irais jamais
La méditerranée si nue de l’autre bord
Hamid de Kabylie a cessé de m’attendre
Au bled à Michelet
Michèle me tient la main parfois quand je transpire
Elle reste avec moi elle me donne des mots
Comme des enfants heureux
Quand je me couche alors le désert se retire
Et si je sens parfois un souffle sur mon dos
J’en prends assez pour deux
L’amour me condamne perpétuité infime
A la saveur du jour demain qui se prépare
A me noyer encore
A la douceur du grain aux fragrances intimes
Et aux navigations obscures et sans radar
Pour repousser les ports
Le facteur est passé du mot épistolaire
Tenant son pistolet à factures braqué
Dans ma boite crânienne
Je sème à la tempête des jeux de solitaire
Cette lettre nouvelle qui n’est pas arrivée
Est-ce la pénultième
Tout ce temps échappé fuyant d’une blessure
Pour encore une aurore et une aurore parfois
Respirant l’avenir
Le surf sur les lames frôlant la déchirure
Et les chevaux d’embruns galopant sous le toit
Je les entends hennir
Et des visages lampe et du son de vos voix
J’éclaire consciemment jusqu’au fond de mon cœur
Une onde familière
Un rire de guitare qui me secoue parfois
Un hoquet ferraillant qui ressemble au bonheur
Le sang de l’éphémère.
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