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04/12/2010

HOMMES

HOMMES

Hommes de sale caractère

Hommes de mes deux mains

Hommes du petit matin

La machine tourne aux ordres de Deibler (1)

Et rouages après rouages dans le parfum des percolateurs qui suinte des portes des bars et le parfum des croissants chauds

L'homme qui tâte ses chaussettes durcies par la sueur de la veille et qui les remet

Et sa chemise durcie par la sueur de la veille et qui la remet

Et qui se dit le matin qu'il se débarbouillera le soir

Et le soir qu'il se débarbouillera le matin

Parce qu'il est trop fatigué

Et celui dont les paupières sont collées au réveil

Et celui qui souhaite une fièvre typhoïde

Pour enfin se reposer dans un beau lit blanc...

Et le passager émigrant qui mange des clous

Tandis qu'on jette à la mer sous son nez

Les appétissants reliefs de la table des premières classes

Et celui qui dort dans les gares du métro et que le chef de gare chasse jusqu'à la station suivante...

Hommes de sale caractère

homme de mes deux mains

Homme du petit matin.

 

Robert DESNOS 1934

(1) Anatole Deibler était le bourreau et sa machine était la guillotine.

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