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22/07/2010

Sérénité ?

Un coup d’œil par la fenêtre de la cuisine. Herbes sèches, terre râpeuse, gondolée, travaillée par les taupes et par le soleil. La haie, la route, la maison des voisins, plus loin les grands sapins amputés du coté sud-ouest par les grands vents et les grandes pluies. Plus près quelques fleurs qui patientent en attendant la fraicheur du soir et le passage de l’arrosoir. La trop fine tige de l’érable planté dans la beauté d’une fin d’hiver dont chaque souvenir s’est évaporé depuis longtemps. Le cerisier qui conserve encore, inaccessibles, quelques beaux fruits murs trop haut placés, la part du merle... Le portail de bois tordu et cassé, la route grise par laquelle se font les départs et les retours…

 

Passage des saisons, paysages banals toujours recommencés et toujours nouveaux de la nature magnifique. Encore une journée pas trop mauvaise… La douleur qui irradie dans la jambe, la brûlure dans l’œil, rien de grave, à priori. Garder le silence et profiter de la beauté du jour, du prunier qui fléchit sous le poids des fruits, de la douceur du matin, des rires de l’enfance…

Bien sur elle est par là qui guette parce qu’il ne peut pas en être autrement. Ici ou ailleurs, la fin du voyage.

Sur la peau la caresse d’un courant d’air, le poil dressé dans un frisson, le goût du café chaud réveillant les papilles. Au jour le jour, à la minute la minute, profiter du présent, des légumes qui murissent dans le jardin potager, des fruits qu’il faut ramasser pour faire la confiture et les gâteaux… S’épargner des angoisses superflues tant que faire se peut. Combien de temps ? Evacuer les pensées sombres, les colères. Profiter de chaque instant mesuré entre deux inquiétudes comme on prend, à peine, le temps d’admirer la montagne entre deux virages.

 

Est-ce que cela vient brusquement ou bien au terme d’un long cheminement de souffrances diverses, de coups reçus, de vacheries, de trahisons ? Quand on ouvre le tiroir des souvenirs ensoleillés de rires et de chansons, de fêtes, de vin et d’alcool ? De cet enchaînement miraculeux de rencontres de situations, de douleurs, d’amours, d’amitiés, de temps, qui fait qu’à cet instant précis, maintenant, nous sommes ce que nous sommes ?

Toujours est-il que cela est ! Ce resserrement autour du primordial, cette urgence absolue de l’essentiel. Cette lucide vision de l’irrémédiable.

Alors, se concentrer sur soi, sur la recherche de la sérénité, sur le bonheur de l’autre, sur le geste et sur le silence partagé, sur le poids de chaque seconde comme sur  le poids de chaque éternité. Profiter du bonheur de l’autre pour enrichir plus encore le bonheur commun, le chant des oiseaux, la beauté fragile des fleurs, la magnificence des arbres, la souveraineté des montagnes.

 

Comme sans rien comprendre, s’allonger sur le sol, regarder juste en face l’énorme masse du pic de Charbonnel, la courbe  féminine, ondulée, sculptée dans la blancheur du glacier, fermer les yeux…

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